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Quel prix pour l'eau ?
Ce coût est, avec la quantité d’eau consommée et les taxes et redevances, un des trois déterminants du montant de la facture d’eau payée par les ménages. Ainsi, ce n’est pas l’eau que l’on paye, mais le service nécessaire à son prélèvement, son traitement, son épuration et son transport.
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Les règles de base dans la fixation du prix de l’eau
La question de l'eau est très bien encadrée par les textes législatifs. Sur la tarification plus précisément plusieurs règles existent notamment basées sur le principe de l'eau paie l'eau.
La loi sur l'eau et les milieux aquatiques (LEMA) a introduit le principe de plafonnement de la part fixe. Les montants des abonnements domestiques — pour les services d’eau potable d’une part et les services d’assainissement collectif d’autre part — ne doivent pas excéder 30 % du montant d’une facture pour 120 m³ (hors taxes et redevances des agences de l’eau). Ce montant est ramené à 40 % dans le cas de services ruraux.
La réglementation sur le plafonnement de la partie fixe a prévu une exception pour les communes touristiques. Cela permet de répercuter le coût des infrastructures qui seront surdimensionnées afin d’être adaptées aux besoins en saison haute.
Cependant, le tourisme n’explique pas tout et une population saisonnière peut également être liée aux habitats secondaires au sein de communes n’étant pas considérées comme touristiques.
Le prix du service d’eau et éventuellement de celui de l’assainissement fait l’objet d‘une délibération par le conseil municipal, le conseil communautaire ou le comité syndical chaque année.
Ainsi chaque collectivité en charge d’un service d’eau fait donc des choix de gouvernance en fonction du contexte local (commune, établissement public de coopération intercommunal, …), tels que :
La qualité du service
- en fonction de la disponibilité et la qualité des ressources locales : plus la qualité de l’eau des ressources locales est élevée, moins elle nécessite de traitements qui sont coûteux en équipement, en personnel, en énergie, etc.
- selon la performance du service : objectifs de rendement, objectifs de réclamations, etc.
- en fonction de la qualité de la communication : accueil, centre d’appels…
Le contexte géographique :
- en fonction de la distance entre les lieux de prélèvement et les lieux de consommation : plus l’eau est accessible et proche, moins son pompage et son transport sont coûteux ;
- en fonction de la gestion du patrimoine : entretien des réseaux, des stations d’épuration, etc. ;
- selon la topographie du territoire : reliefs montagneux ou escarpés contrairement à une plaine par exemple.
Les choix techniques :
- selon les efforts d’assainissement et d’épuration qui sont nécessaires au rejet des eaux usées dans le milieu naturel, et donc des exigences de protection de l’environnement ;
- en fonction du type de traitement de l’eau potable et de l’assainissement.
La population :
- la densité de population de la collectivité permet de faire des économies d’échelle : dans les grandes villes, les coûts associés aux services sont répartis sur plus de ménages, ce qui permet un prix par ménage moins important.
Le tourisme :
- comme expliqué précédemment, la fréquentation touristique nécessite des infrastructures adaptées pouvant répondre à l’augmentation ponctuelle de la consommation en eau.
Le financement :
- en fonction des conditions de financements : concession, recours à l’autofinancement, amortissement, etc.
Ces choix sont propres à chaque collectivité. Ils influent directement le coût des services d’eau.
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Répartition du prix de l’eau du service public : charges des services, taxes et redevances
Le prix de l’eau se décompose en trois parties :
(i) les charges du service public d’eau potable (distribution de l'eau) ;
(ii) les charges du service public d’assainissement collectif (traitement des eaux usées) ;
(iii) les taxes et redevances (prélèvements des organismes publics).
Les charges des services d’eau potable et les charges des services d’assainissement correspondent respectivement à 38 % et à 41 % du prix de l'eau en 2022. Au total, ces charges constituent donc 79 % du prix de l’eau. Les 21 % restants sont constitués des différentes taxes et redevances.
Les charges liées aux SPEA servent à financer les infrastructures liées aux réseaux, captages, stations de traitement de l’eau potable et des eaux usées, etc. ainsi que les dépenses associées au fonctionnement et à l’entretien de ces services.
Les redevances, destinées aux agences ou offices de l’eau, servent au financement d’actions de préservation et de restauration des milieux aquatiques.
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Le prix de l'eau selon l'observatoire national des services publics d'eau et d'assainissement
Le prix total de l’eau en 2022, toutes taxes comprises, est évalué à 4,52 €/m3 dont 2,21 € pour l'eau potable et 2,31€ pour l'assainissement collectif.
En 2021, il était de 4,34 € (2,13€ pour l'eau potable et 2,21€ pour l'assainissement collectif).
Par convention, il correspond au prix en vigueur au 1er janvier de l'année N+1 et est établi sur la base d'une consommation annuelle fixée par l’INSEE de 120 m³ correspondant à la consommation moyenne d’un ménage (2 adultes et 2 enfants) sur une année.
Cela correspond donc à une facture annuelle de 542,40 €/an (45,20€ par mois) en 2022 et de 520,80 € (43,40 € par mois) pour 2021. En 2022, cette facture représente au niveau national environ 2 % du budget des ménages.
Le prix de l'eau selon le mode de gestion
Les collectivités sont responsables de la gestion des services publics d’eau et d’assainissement collectif (SPEA), mais elles peuvent déléguer ce travail à un tiers.
Dans ce cas, le délégataire se rémunère et le prix de l’eau se découpe entre trois parts :
(i) la part revenant à la collectivité ;
(ii) la part revenant au délégataire ;
(iii) les taxes et redevances.
Pour les services dont la gestion est déléguée, la répartition est la suivante (données SISPEA 2022) :
Le prix des SPEA est en moyenne plus élevé pour les services en délégation, mais l'ampleur de cet écart varie dans le temps.
La principale raison généralement mise en avant pour expliquer ces écarts est que les collectivités ont plus souvent recours à la gestion déléguée lorsque les enjeux de la qualité de l'eau potable et des rejets des stations de traitement des eaux usées supposent la gestion d'équipements complexes. Par exemple, des usines de traitement d'eaux brutes ou d'eaux souterraines polluées par les nitrates ou les pesticides, un traitement poussé des eaux usées dans des secteurs à forts enjeux environnementaux et/ou sanitaires, etc.
Bien que depuis 2010 l'écart semble se réduire, il n'est pas possible de prévoir son évolution. En effet, celui-ci est notamment impacté par le changement de mode de gestion de certains services de grandes tailles, ou des renégociations de contrats existants.
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Un prix de l’eau qui augmente régulièrement
Entre 2010 et 2022, le prix des SPEA a augmenté de 23 % (SISPEA, OFB).
Cette augmentation s’explique par différentes raisons :
- Ces dernières années, de nombreux investissements et travaux de modernisation des réseaux ont été réalisés pour la mise aux normes des réseaux de collecte des eaux usées et des stations de traitement. Le coût de ces investissements s’est ensuite répercuté sur le prix de l’eau.
- Parallèlement, les règles sanitaires et environnementales sont de plus en plus exigeantes ce qui implique des procédures de traitement plus complexes et coûteuses.
- De manière similaire, les sources de pollutions, et notamment de pollutions diffuses, se sont accrues et multipliées ce qui a nécessité une amélioration des traitements de l’eau.
- Enfin, les variations des montants des taxes peuvent impacter le prix : la TVA sur la partie assainissement est passée de 5.5 % à 10 % entre 2011 et 2014 (Article 279 du Code général des impôts)
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Un prix de l’eau différent selon les territoires en France
Il existe de fortes disparités selon les régions et départements.
Ainsi, en 2022, les Hauts-de-France (5,01€/m³), la Bretagne (5,04 €/m³), la Guadeloupe (5,36 €/m³) et la Martinique (5,85 €/m³) sont les régions où le prix moyen est le plus élevé. A contrario, la Réunion (2,93 €/m³), la Provence-Alpes-Côte-d’Azur (3,91 €/m³), l'Occitanie (4,12 €/m³) et le Grand-Est (4,12 €/m³) sont les régions françaises où le prix moyen est le plus bas.
En France métropolitaine, le prix moyen de l’eau est globalement plus élevé au nord-ouest et plus bas dans le sud-est.
De très nombreux facteurs de contexte local (complexité technique du service, provenance des eaux, sensibilité du milieu récepteur, dispersion de l'habitat, pression touristique, etc.), mais aussi des choix politiques en matière d’investissements, de gestion et de qualité de service, contribuent à expliquer l’ensemble des écarts de prix décrits dans le rapport national de l'observatoire des services publics d'eau et d'assainissement.
Le système d’information des services d’eau et d’assainissement (SISPEA) est un observatoire national qui référence l’organisation des SPEA et recense les données techniques et économiques de ces services. Il vise à mettre à disposition du grand public une cartographie complète de ces services (prix, organisation, indicateurs de performance, etc.). Pour en savoir plus...